ENTRETIEN | PODCAST : Doot et Blibloop racontent le développement de « Minami Lane »
« Minami Lane » jeu de gestion cosy, produit en six mois, est sorti depuis le 28 février. En amont du lancement, l'équipe s'est confiée au sujet de son processus de création.
Doot et Blibloop ont bien voulu raconter sur le développement de leur titre, Minami Lane.
Un jeu de gestion de rue tout mignon et cosy, sorti sur Steam le 28 février 2024.
Écouter le podcast :
Lire l’interview :
Faisons les présentations !
Blibloop : Moi c’est Doriane alias Blibloop. À la base je ne suis pas du tout artiste. Avant, j’étais analyste dans une boîte de jeux vidéo et il y a deux ans à peu près, j’ai lancé ma propre boutique en tant qu’illustratrice et créatrice. Minami Lane c’est mon premier jeu en tant qu’artiste.
Doot : Bonjour, moi c’est Doot (Dorian), je suis développeur indépendant depuis mai dernier. J’ai sorti un premier jeu qui s’appelle Froggy’s Battle et là je travaille sur mon deuxième jeu en collaboration avec Blibloop, Minami Lane. Avant ça, j’ai fait de la data science, une reconversion puis j’ai travaillé chez Homo Ludens, un petit studio parisien qui a sorti son premier jeu Blooming Business.
Parlons de Minami Lane. D’où est venue l’idée ? Comment ça s’est goupillé ?
Doot : Faire un jeu en trois mois, c’est quand même une contrainte qui est très, très forte et qui nous a poussée vers différentes idées assez précises. L’une de nos dernières game jam a donné Poda Wants a Statue, un jeu de Ludum Dare. On avait fait 13ᵉ, 11ᵉ peut-être, je ne sais plus, mais ça s’était mégabien passé !
C’était une sorte de mini jeu de gestion en vue isométrique avec les musiques du compositeur de Minami Lane (Zakku). Bref, on sentait déjà beaucoup les prémices. À l’époque, les idées venaient surtout de Doriane, on avait suivi un peu, on va dire, sa direction créative. Doriane n’a pas changé depuis l’époque et veut toujours expérimenter sur l’isométrique, et elle aime toujours autant les mini jeux de gestion. Il y avait encore cette envie de faire quelque chose un peu dans cet esprit-là.
[Le processus] d’itération est plus complexe que simplement « couper des morceaux ».
Blibloop : Je sais pas trop ce que je peux dire de plus ! Mais oui, à la base, c’était un peu bête parce que c’était juste « j’ai envie de faire de l’isométrique, je trouve ça mignon. J’aime bien les petits mondes un peu vivants où il y a des tas de petits bonhommes, de petits bâtiments. Donc, je n’ai pas encore décidé de quel jeu on fera, mais je veux ça ». Et à partir de là, on a commencé à discuter à ce qui nous semblait le plus cohérent.
Doot : Évidemment, la conception du jeu s’est faite avec beaucoup, beaucoup de discussions. En gros, si l’on caricature, il y avait un peu ce côté où Doriane disait « ce serait vraiment bien qu’on fasse un jeu où en fait on construit un village et où on voit toute la vie. Peut-être qu’on peut faire aussi l’intérieur des maisons, et puis… ». Moi, j’étais du genre « plus court, toujours plus petit s’il te plaît, plus petit, plus petit, plus petit… » et un jour elle m’a dit « tiens, peut-être qu’on pourrait faire un jeu de gestion de rue ». Et là je dis AH OUI, ça c’est petit, ça me va. On cherchait, et je pense que je chercherai toujours quelque chose qui soit « pitchable » facilement.
Je pense que ça, ça vient un peu de notre vécu d’avoir travaillé pendant trois ans, cinq pour Blibloop, chez Ubisoft dans les départements marketing. Il y a un côté où l’on ne veut pas s’engager sur quelque chose d’incompréhensible et qui n’est pas non plus vendeur en quelque sorte.
Là, on trouvait que « jeu de gestion de rue », de style japonais ça renvoie à plein de fantaisie, à un imaginaire et une esthétique assez claire et qui collait bien. Tout s’imbrique bien ensemble. Je ne sais pas, on sentait qu’il y avait quelque chose et du coup on est parti là-dessus et l’on a affiné l’idée petit à petit. Évidemment, nos idées de base ne ressemblaient pas du tout à ce qu’on a aujourd’hui.
Elles ont évolué comment ces idées ? En allant vers toujours plus petit, toujours plus petit ?
Blibloop : Je ne sais pas si l’on aura exactement la même réponse, mais au début, ce que j’imaginais pour le jeu, ce n’était pas forcément ce qu’il y a aujourd’hui. Moi je voyais bien quelque chose de très très « zen ». Je ne sais pas si tu connais des jeux du type de Dorfromantik : la UI est hyper claire et tout est très très reposant. Et vu qu’on partait sur quelque chose d’assez petit, je me suis dit « pourquoi ne pas faire un truc pareil très reposant sans beaucoup d’informations, où il faut juste placer les bâtiments correctement » ?
Ça n’a pas forcément évolué dans ce sens-là, Minami Lane est beaucoup plus rempli. Il y a quand même beaucoup d’UI, de petites mécaniques, donc c’est un peu moins zen et un peu plus complexe, mais après c’est très cool aussi. Je suis très contente parce que je trouve que ça ajoute de la vie, ça rajoute un petit peu de variété.
Doot : Pour revenir sur « comment se font ces itérations, comment se crée ce design ? »… c’est là que c’est intéressant : on n’a pas tout à fait les mêmes manières de travailler, les mêmes envies, les mêmes visions pour le jeu non plus — ça, c’est normal — même si l’on se connait très bien et qu’on a des facilités à dialoguer. En tout cas, les envies de base ne sont pas toujours exactement les mêmes. Et en particulier, justement, tu disais « est-ce que ça s’est fait en coupant de plus en plus de choses ? ». Et bien non, pas vraiment pour celui-là. Pour Froggy’s Battle, oui, par exemple.
[Minami Lane] c’est un peu un mélange entre nos manières de faire, nos envies, nos connaissances sur le sujet, le design, notre cible, le public, etc. Mais il y a un point par contre qui reste : les playtests.
C’est quand même beaucoup ma manière de faire, d’aller vers de l’essentiel. Souvent, c’est un peu notre point d’accroche dans nos décisions, dans nos discussions design et dans nos réunions. Moi j’adore couper, je veux enlever des choses. Doriane, à l’inverse, a beaucoup de mal et préfère qu’on fasse plus d’efforts pour arriver à des choses qu’elle a en tête.
Sur ce projet, on avait décidé dès le début que c’était quand même surtout à elle que revenait la direction créative. J’ai tendance à accepter de m’effacer parfois pour dire « OK, toi vraiment, tu penses que c’est bien ça ? ». Moi ça me fait du mal parce que j’ai l’impression que ça va mettre en l’air le planning, qu’on n’y arrivera pas, que ça va complexifier trop le jeu… Tant pis, c’est un genre que Doriane connait mieux et du coup, l’itération est plus complexe que simplement « couper des morceaux ».
C’est un peu un mélange entre nos manières de faire, nos envies, nos connaissances sur le sujet, le design, notre cible, le public, etc. Mais il y a un point par contre qui reste : les playtests. Ça, vraiment, c’est au cœur de notre processus. C’est vraiment quelque chose que je fais sur absolument tous mes projets de faire des playtests très réguliers : une session tous les mois avec une version sur laquelle on teste vraiment l’avancée du projet, des points un peu spécifiques qui nous permettent vraiment de définir ce qu’on va faire pour la suite. « OK, ça on met à la poubelle parce qu’en fait ça ne répond pas aux problèmes actuels, ça, on va se concentrer dessus, il va falloir qu’on trouve une réponse à ça, etc. ».
On entend souvent des gens dire que c’est vachement cool les playtests, mais que pour leur projet, ça ne s’y prête pas. Si. Il faut que ça s’y prête. Je pense que, dans ce cas, il faut revoir le projet en quelque sorte. Même en jam de deux jours, on fait des playtests : au jour 1 ou au jour « 1 et demi » pour voir ce qui va, ce qui ne va pas et qu’est-ce qu’on peut changer sur la fin de la jam pour arriver à quelque chose de plus équilibré, plus intéressant, plus compréhensible, etc.
C’est très étonnant ces gens qui rechignent aux playtests, ils font des jeux pour… personne ?
Doot : Alors ça c’est un gros truc. Je pense que, déjà, il ne faut pas sous-estimer à quel point c’est compliqué d’organiser et d’analyser des playtests. Ça demande d’avoir une version jouable à un moment T du jeu et il y a toujours des raisons de se dire « non, mais là ça ne sera pas intéressant, ce ne sera pas pertinent » ou « de toute façon, les gens ne vont rien comprendre, ça va être pourri ».
Blibloop : Je pense qu’il y a aussi pour partie, des gens qui, quand ce n’est pas parfait ou ce qu’il estime être à peu près parfait, ne vont pas vouloir montrer leur jeu parce qu’ils vont avoir peur. Ils se disent « non, là il manque ça, il manque si… je ne peux pas le montrer tout de suite ». Et donc ils repoussent, repoussent, repoussent et, au final, il n’y a pas de playtest.
Doot : Il faut y mettre de l’énergie. Même pour nous, c’est vraiment dur. C’est parce qu’on s’est fixé ça comme des piliers absolus qu’on les fait. Mais il y a des tas de fois où on s’est dit « vas-y peut-être on ne fait pas celui-là, là, ça sert à rien. De façon on sait comment il faut qu’on avance ». C’est complètement faux. Mais juste avant une session, on est toujours dans une sorte de pression du « non, mais c’est nul ce qu’on a là, ça ne sert à rien, ça ne va pas répondre à nos questions ». Et ça demande sur le moment d’aller au-delà de craintes personnelles, mais aussi d’y penser en amont dans son organisation et dans son calendrier, de préparer des points d’étapes et de préparer des versions jouables et approximativement compréhensibles du jeu à des temps bien précis.
Je pense que c’est plus rare mais il existe aussi des game designers qui se disent que, si le joueur ne comprend pas, c’est qu’il est stupide et pas parce que le jeu est mal expliqué.
Il y a de la subtilité là-dedans aussi. Je pense qu’il peut y avoir un intérêt à faire des jeux très très personnels. Il ne faut pas tout mélanger justement, mais les questions d’usage et de compréhension de tout ça, je pense qu’elles restent importantes pour n’importe quel type de jeu. Par exemple, justement, si un joueur n’a pas compris, c’est qu’on a mal expliqué et c’est tout, il n’y a pas d’autres raisons.
C’est un truc important pour nous de savoir à peu près à qui l’on s’adresse, qu’est-ce qu’on essaie de faire et à quelle motivation on essaie de répondre.
Blibloop : Je pense que pour ceux qui ont pas forcément une formation marketing et qui ne sont pas forcément très au fait d’avoir une cible, savoir à qui tu t’adresses, etc. c’est compliqué. J’imagine qu’il y en a qui se disent « j’ai envie de faire le jeu de mes rêves, j’y vais », et ne pensent pas forcément à si ça va intéresser les gens.
Vous, vous aviez une cible déjà bien définie en tête pour Minami Lane ?
Blibloop : Je pense qu’on l’avait effectivement, mais je ne pense pas qu’on l’ait définie dès le début de manière hyper claire. On n’a pas verbalisé à qui on s’adresse, qui est notre cible primaire, secondaire, etc. Je pense que c’est venu au fur et à mesure et, vue la nature du jeu qui est très mignonne, très cosy ça nous semblait assez limpide.
Dans notre tête c’était ce qu’on appelle les cosy gamer, les joueurs et les joueuses qui aiment bien les expériences un peu relaxantes type Animal Crossing, qui veulent de la gestion, mais pas forcément des trucs très très compliqués. Pas trop de challenge non plus. C’est une audience qu’on connaissait bien et bon, j’en fais moi-même partie. On ne s’est pas fait un mégaplan marketing dès le premier jour.
Doot : J’avoue que j’ai un peu du mal avec ça aussi. On est beaucoup quand même à considérer que parfois le marketing part un peu trop en vrille dans le bullshit, et que parfois essayer d’aller trop précis justement sur des définitions de persona, des trucs ultras carrés, c’est un peu oublier la complexité de la vie est des gens. Parfois, c’est aussi malheureusement mettre des cases qui ne devraient pas exister sur des joueurs. Il y a un flou que j’accepte en quelque sorte sur qui sont les gens qui vont jouer à notre jeu et tout.
Par contre, c’est important de quand même à peu près se rappeler quelles sont approximativement les motivations auxquelles on essaie de répondre. Et d’avoir quelques questions ciblées en début de playtest. Je ne sais plus comment on les a formulées, mais il y a une question type « est-ce que tu aimes les jeux de management » et « est ce que tu aimes les jeux cosy wholesome » ? Ces questions-là et d’autres toutes petites questions de profils nous permettent de savoir comment analyser les réponses. C’est un truc important pour nous de savoir à peu près à qui l’on s’adresse, qu’est-ce qu’on essaie de faire et à quelle motivation on essaie de répondre.
Blibloop : Je pense qu’on essaie aussi d’avoir une vision du marché qui n’est pas complètement à la ramasse. Donc par exemple, ne pas essayer de créer un jeu qui était populaire il y a dix ans, si aujourd’hui il y a zéro marché pour ça. Donc on essaie de rester à peu près conscients de ça, même si ce n’est pas très très facile de voir tout ce qui se passe.
Garder l’œil partout, c’est quand même très compliqué. Et puis ça bouge très très vite surtout. D’où l’intérêt peut être de faire des projets courts ?
Doot : On a pas mal de newsletters, d’outils, sur ce qui sort sur Steam, ce qui est le plus joué… pour nous tenir au courant même si ça demande pas mal de temps et des outils aussi d’analyse. Par exemple, Gamalytic a un petit site qui nous permet de trier par vente avec plein de filtres. Je regarde régulièrement les jeux qui sont sortis entre 1 $ et 5 $, ce mois-ci et qui ont le plus vendu. Et comme ça, ça permet de voir qu’encore ce mois-ci c’était des clones de Vampire Survivors et des jeux de cul.
Nous, quand on a regardé on s’est demandé : « Est-ce qu’il y a d’autres jeux entre 1 $ et 5 $ de management qui ont bien marché ? Lesquels ? À quoi ça ressemble ? D’accord, il y a plutôt de l’idle game, c’est intéressant ». Nous, on élimine ça parce que ce n’est pas ce qu’on a envie de faire. En tout cas, ça veut dire que ça a un marché potentiel, mais à qui on ne parlera pas trop. À côté de ça, des jeux qui nous ressemblent plus, ils sont plus entre 5 $ et 10 $ (Minami Lane est vendu 5€ NDLR). C’est intéressant parce que ça veut dire qu’il va falloir qu’on calme les attentes des gens en disant « Non, ça ne ressemblera pas à ces jeux-là, il y aura moins de contenu ». En bref, c’est cool parce que ça nous apporte quand même des infos.
Ce sont des réponses qui seront vraies dans trois mois. Le marché ne va pas changer radicalement sur cette temporalité, on est dans les temps en quelque sorte. À l’inverse, c’est vrai que, quand on travaillait chez Ubisoft et qu’on faisait des études de marché pour un jeu qui sortait dans trois ans, c’était un casse-tête ! Prédire le futur, ce n’est pas possible.
Quand on fait de sa passion son métier, c’est peut-être le meilleur moyen de détruire sa passion.
C’est quand même une facilité très appréciable dans le fait de faire des petits jeux. C’est vrai pour tout. J’en parlais avec l’UI/UX designer qui m’a aidé pour Froggy’s Battle. Lui travaille pour un gros studio et je lui demandais « quand vous développez l’interface, comment vous faites pour ne pas prendre des trucs qui sont à la mode juste aujourd’hui ? Parce que si votre jeu sort dans quatre ans, ça sera complètement daté et nul ». Il m’a répondu « c’est absolument terrible parce qu’en plus les équipes ne se rendent pas compte qu’elles sont influencées par les modes ».
Alors que nous, UI, benchmark : les gens font ça, ils attendent ça, ils aiment ça. On trouve ça cool parce que nous aussi on est influencés par la mode et c’est comme ça. La UI « pure blanc » de Minami Lane par exemple, c’est un truc très actuel. Le blanc FFFF, c’est quelque chose qu’on ne voyait pas du tout il y a cinq ans, qu’on ne reverra peut être pas du tout dans cinq ans, mais aujourd’hui ça existe, c’est apprécié et du coup, on peut se permettre de l’utiliser.
Au niveau de votre emploi du temps vous êtes à des volumes horaires plutôt classiques.
Doot : Oui, je pense que c’est super important. Je suis très très très à fond sur l’équilibre vie privée / vie pro et sur le fait de ne pas trop travailler. Parce qu’à un moment, le surtravail en prépa m’a pas mal détruit la vie. J’ai fait un bon petit passage en hôpital psychiatrique à cause de ça. Parce que je pense aussi que c’est ultra-important d’éviter que le travail bouffe tout le reste de la vie qui est quand même vachement intéressante.
Et aussi, il y a quand même un truc : quand on fait de sa passion son métier, c’est peut-être le meilleur moyen de détruire sa passion, si l’on s’y investit trop. Je ne sais pas comment le formuler, mais injecter le travail avec toutes ces difficultés, toutes ces contraintes, dans un monde capitaliste avec des recherches de profits, ça peut très vite l’abîmer. J’essaie de mettre des barrières parce que j’ai envie d’avoir une vie saine, parce que je n’ai pas envie de me dégoûter du jeu vidéo. J’aime jouer et j’aime voir comment cette industrie et ce média se développent et continuent de changer. J’essaie d’organiser mes semaines de manière assez carrée, sur une limite d’heures et des blocs horaires assez réguliers.
Blibloop : Je ne fonctionne pas tout à fait pareil. En fait, une fois que je suis investie dans quelque chose, c’est très très très (très) dur de me sortir la tête de ça. Si en plus ce sont des projets personnels, c’est encore pire. Doot m’aide à me canaliser et me dire « OK, c’est bon, là c’est fini, je dois arrêter de travailler ». Je peux me lancer et ne pas voir les heures passer, je dois me retenir un peu.
Après, même avec ma boutique, je m’étais quand même fixé les mêmes horaires qu’à Ubisoft : une semaine normale où j’ai mes week-ends, mes soirs, etc. Donc j’avais quand même posé ça dès le début et j’ai l’impression que ça marche quand même ! Pour le projet, il y a des fois où je déborde un peu, mais globalement, j’ai les mêmes horaires depuis mon premier stage. En indépendante ou salariée, c’est un peu la force de l’habitude et ça marche bien pour moi vu avec ma tendance à trop travailler.
Une version mobile n’a pas été envisagée ?
Doot : Si, mais pourquoi est-ce que… Non ? C’est un jeu qui se prêterait très bien au mobile et pendant tout le développement de Froggy’s Battle, énormément de gens me disaient la même chose. J’étais complètement d’accord, ce sont des contrôles simples, des visuels qui se prêtent au mobile, de petites parties, etc. Là, Minami Lane, c’est presque encore plus visible parce que vraiment tout se fait au clic.
Donc pourquoi pas de version iOS ou Android ? La première raison, c’est que ce n’est pas évident de développer sur mobile. Il y a beaucoup, beaucoup de choses qu’on sous-estime dans le fait de porter un jeu sur mobile. Pour ne pas trop développer, je renvoie vers une vidéo de Doc Géraud qui avait sorti un devlog du portage sur mobile de son jeu Larcin Lazer, dans lequel il expliquait que c’est un enfer. Lui qui pensait le faire en deux semaines, ça lui a pris plus d’un mois. Ce n’est pas rien, du tout, jamais.
Surtout si on table sur un mois pour un projet qui en dure six pour nous, ce n’est vraiment pas envisageable. On préfère polish le jeu, ce n’est pas dans notre liste de priorités parce qu’on pense que ce n’est pas tout à fait pertinent non plus : ça le serait d’un point de vue jouabilité, mais pas d’un point de vue marché. Le mobile demande des investissements de fou en marketing. C’est accepter qu’un joueur ne vient jouer à ton jeu que si tu le payes. Il y a cette notion de « cost per install » où on va mettre 0,30 € pour avoir un utilisateur ou une utilisatrice. C’est un marché extrêmement agressif sur la publicité, sur le free-to-play, des systèmes de monétisation différents, des habitudes de jeu aussi, et de cycle de jeu qui ne sont pas les mêmes. On pense qu’on ne parlerait pas aux bonnes personnes en y allant.
Vous voyez déjà la fin du projet Minami Lane. Est-ce que vous avez envisagé la suite ?
Blibloop : Pour moi, là-dessus, c’est assez simple : je continue ma boutique et pour l’instant je ne pense pas que j’aurai de projets de jeux à venir. Enfin après on sait jamais, peut être que dans un an je reviendrai, mais c’est dur, ce n’est pas forcément super rentable, et je dois vivre aussi. Je vais reprendre mon activité d’illustratrice et ma boutique.
Doot : Oui, créer un jeu ce n’est pas rentable et il faut vivre. J’ai le chômage encore quelque temps. Je continuerai d’expérimenter sur des petits projets comme ça, c’est sûr. Par contre, quel format ça prendra ? Je n’en sais rien. Ce qui est sûr, c’est qu’il y aura d’abord un gros temps de pause. Obligé. Comme après Froggy’s Battle. J’avais vraiment besoin de me poser, de faire autre chose. Donc… j’ai fait du dev. Je vais sans doute refaire pareil mais sans la pression du jeu commercial.
L’idée que j’ai pour l’instant, on verra si c’est encore le cas en mars, c’est d’apprendre le moteur de développement de jeu Godot. Aujourd’hui, je développe sur Unity. Godot c’est un moteur qui, d’un point de vue éthique, a quand même beaucoup de force, et qui me permettrait de monter le même type de projet. Et en plus, ça a l’air d’avoir une architecture sur certains aspects qui pourraient être plus intéressants que Unity. Donc je vais essayer pour ensuite voir si le prochain projet se fait sur Godot ou pas. Par contre, si la question c’était « est-ce qu’on sait quel jeu on va faire après ? », non… aucune idée.
Une semaine après la sortie du jeu, Doot et Blibloop partagent quelques chiffres (via Twitter)
28 000 exemplaires vendus
99% d'avis positifs
637 avis
300 vidéos Youtube sur le jeu
30% des joueurs ont terminé le jeu en entier
3 avis approuvés par Metacritic
Super comme format, j'adore ! Ça m'a appris pleins de choses et c'est intéressant d'avoir la vision des créateurs surtout quand ça concerne un si petit groupe. Hâte de la prochaine interview !
c'etait super interessant. J'ai connu mini lane grace a toi et j'ai adore. J'espere que tu referas des podcasts a l'ccasion.